Williams-Kilburn
Tube d'oscilloscope comme mémoire d'ordinateur
Historique
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Les tubes d'oscilloscopes ont été mis à toutes les sauces:
  • Ils ont évidemment été utilisés comme oscilloscope pour visualiser les signaux électriques. Ils étaient utilisés pour montrer le signal des premiers radars anglais et allemands pendant la seconde guerre mondiale, ils étaient utilisés pour montrer la modulation d'un émetteur AM, pour montrer la bande passante d'un ampli,...

    Les tubes d'oscilloscope seront utilisés pendant plus de 50 ans, jusqu'à ce que les tubes soient remplacés par un écran LCD. Les premiers écrans LCD avaient un problème de taille, ils ne pouvaient pas montrer l'enveloppe d'un signal et les deux systèmes ont cohabité pendant plus de 10 ans.

  • Aussi étrange que cela paraisse, les tubes d'oscilloscope modifiés pouvaient également être utilisés comme convertisseur analogique - numérique. Et quand on regarde de près comment il s'y sont pris, on se dit "bon sang, mais c'est bien sûr!

  • L'oscilloscope a également été utilisé comme téléviseur, principalement aux Etats Unis. Les Etats Unis ont utilisé une déflection électrostatique jusque dans les années 1950. En Europe, on était déjà passé à la déflection magnétique avant la seconde guerre mondiale, permettant de passer d'un angle de déflection de 5° à 110° dans les derniers téléviseurs à écran cathodique. L'angle de déflection plus important permet de raccourcir le tube.

Mais ici je veux vous parler d'une autre application du tube d'oscilloscope, notament la mémoire d'ordinateur. Dans les premiers ordinateurs, il fallait une double triode pour stocker un bit d'information. C'est admissible pour un régistre de calcul, mais cela devient prohibitif s'il faut stocker des centaines de données.

Déjà à cette époque la mémoire était organisée en mots de 8, 10, 12,... bits. On ne parle pas encore d'octets (bytes) à cette époque car il n'y a pas encore de standardisation dans la longueur des mots. Pour la petite information, les ordinateurs actuels travaillent avec des mots de 64 bits.

Pour stocker 200 mots, il aurait fallu 2000 doubles triodes, ce qui fait quand même beaucoup. Une double triode de l'époque (6SN7) consommait une puissance de 3.8W uniquement pour le chauffage, ce qui fait environ 10kW uniquement pour la mémoire.

C'est ainsi qu'on a recherché des systèmes pour stocker les données actives: le musée de l'informatique à Namur a quelques exemples de mémoires vives: la mémoire à ligne de retard, la mémoire à tambour, la mémoire à tores de ferrite,...

Mémoire Williams-Kilburn

A gauche une représentation schématique de l'écran de l'oscilloscope avec en orange la couche phosphorescente.

Le principe de la mémoire de Williams-Kilburn est basé sur l'émission secondaire. Quand le pinceau écrit un point sur l'écran, il se produit une émission secondaire d'électrons. Le pinceau d'électrons et l'émission secondaire est indiquée en bleu. Cette émission est la plus prononcée avec la couche phosphorescente classique des écrans d'oscilloscopes. Après avoir écrit un point, on obtient un "trou" d'électrons à cet endroit (charge positive = manque d'électrons), indiqué par la tache magenta.

Rapidement ce trou se remplit d'électrons en provenance de la couche phosphorescente et il faut régulièrement renouveller la charge. Il s'agit en fait de la première mémoire dynamique de l'histoire (la mémoire d'ordinateur moderne DRAM est également dynamique et doit continuellement être rafraichie).

L'écriture d'un 1 se fait donc en écrivant un point à un endroit précis de l'écran. On créé ainsi une charge positive à l'endroit du point. Pour écrire un 0, il faut boucher le trou, ce qu'on peut faire soit en écrivant le point à coté de la position normale du trou (les électrons de l'émission secondaire vont boucher le trou), soit en dessinant un trait, soit en écrivant un 1 avec un rayon légèrement défocussé.

Pour lire une position on écrit un 1. S'il y avait déjà un 1 à cette position, il n'y a pas de modification de la charge à cet endroit. S'il y avait un 0, il y a une modification de la charge, qui est détectée par une plaque métallique placée à l'avant du tube. La lecture est destructrice, et s'il y avait un 0 à cet endroit, le 1 doit être effacé après lecture.

A droite le dépot de brevet de 1947. Tout le tube de l'oscilloscope est monté dans un cylindre métallique pour éviter les interférences.

La mémoire Williams-Kilburn est extrèmement rapide, elle travaille à la vitesse des électrons. C'est un grand avantage en comparaison des autres mémoires vives de l'époque. L'accès à un mot est relativement facile.

La visualisation directe n'est pas possible, car la face avant du tube est recouverte d'une feuille métallique. Comme l'affichage n'était pas nécessaire, certains tubes ont reçu un autre type de couchage avec de meilleures caractéristiques. Si une visualisation est nécessaire, on utilise un second écran d'oscilloscope couplé au précédent. Le rafraichissement obligatoire fait que les points et les traits sont bien visibles sur l'écran de controle. C'est une fonction de débugging qui était bien utile à l'époque, elle permettait de voir d'un coup d'œil si le programme s'était planté.

L'organisation des points sur l'écran est déterminée par la structure de la mémoire de l'orginateur, souvent à cette époque avec une mémoire-programme séparée de la mémoire-données.



L'organisation sous un angle de 45° permet une plus grande densité d'écriture (ou une fiabilité accrue pour une même densité d'écriture).

On voit ici l'écriture des 0 par un tiret, le tiret rebouchant le trou causé par l'émission secondaire.

Cette seconde mémoire a une capacité de 16 mots de 16 bits (256 bits). La capacité d'un tube peut dépasser les 1500 bits.

Mais la mémoire de Williams-Kilburn n'était pas très fiable et nécessitait un recalibrage régulier. Ce type de mémoire n'a pas été utilisé dans des applications commerciales. Cette mémoire a été remplacée par la mémoire à tore de ferrite qui a l'avantage de ne pas nécessiter de rafraichissement (c'est même une mémoire permanente qui garde son information en cas de coupure de courant).

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