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La mémoire à film mince sur film est une évolution de la mémoire à tore de ferrites (le lien vous renvoie vers l'introduction, que je vous recommande de lire). La mémoire à tores de ferrite a comme inconvénient qu'on est limité dans la réduction de la taille des composants. Les tores doivent avoir une taille minimum pour pouvoir être enfilés (il y a 3 fils qui passent par un tore). L'écriture et la lecture est complexe car il y a plusieurs fils qui doivent recevoir du courant.
Mais on a inventé une mémoire plus simple, qui est basée sur les propriétés des matériaux magnétiques utilisés. IL y a moins de fils qui sont nécessaires et la lecture n'est pas destructrice. De plus, la mémoire peut être tissée sur des machines spéciales. Il vous faut 2.30 mètres de mémoire? Pas de problème, je vous la tisse à l'instant.. La mémoire se compose de fils de cuivre au beryllium d'un diamètre de 0.13mm recouverts d'un alliage permalloy (81% de nickel et 19% de fer). C'est le permalloy qui enregistre l'information sous forme d'une magnétisation, comme dans la mémoire à tores. La figure montre 3 fils, donc 3 bits. Il y a en plus des bandes qui correspond aux mots. Il y a donc 4 mots de 3 bits dans l'exemple. Le courant dans une des bandes permet de lire tout le mot à la fois. Le nombre de bits par mot dépend de l'architecture de l'ordinateur. Tout le fil est magnétisable, mais le fil ne se magnétise qu'aux endroits où le courant combiné est suffisament fort pour changer la magnétisation, donc aux croisements. La magnétisation circulaire (comme s'il s'agissait d'un tore) est la magnétisation aisée qui se produit lors de l'écriture. La magnétisation longitudinale est une magnétisation difficile: il faut un champ magnétique plus important pour magnétiser le fil en longueur, et le champ magnétique n'atteint jamais cette valeur. Le sens de rotation de la mégnétisation marque un bit 0 ou 1. La lecture est très simple: on envoie un courant dans la bande du mot à lire. Le courant tente de transformer la magnétisation circulaire à cet endroit en magnétisation longitudinale, mais cela ne fonctionne pas. La magnétisation est déviée, mais revient à sa place quand le courant dans la bande du mot est coupé. fluctuat nec mergitur. La lecture est donc non destructrice, ce qui est un très grand avantage. La lecture produit une impulsion positive ou négative dans le fil du bit (bit current). L'écriture est à peine plus complexe: on envoie aussi un courant dans la bande du mot à écrire, mais on envoie également un courant dans le fil du bit. Le courant dans le fil du bit est trop faible pour faire changer la magnétisation, mais aidé par le courant dans la bande du mot, tous les bits du mot sont magnétisés selon le courant positif ou négatif dans le fil. C'est le même principe que la sélection d'un tore dans la mémoire à tores de ferrite. Le système est ingénieux et beaucoup plus simple que la mémoire à tores de ferrite. Tout comme la mémoire à tores, la mémoire à film garde ses données en cas de coupure de courant.
En pratique la mémoire avait tendance à se corroder si les plaques de mémoire n'étaient pas placées dans un boitier étanche (mais de cela on ne s'est rendu compte un peu trop tard...) Pourtant la mémoire a été utilisée dans certains ordinateurs et surtout dans l'aviation: les mémoires magnétiques sont moins sensibles aux rayons cosmiques que les mémoires à puces. On retrouve la mémoire à film mince sur fil dans de nombreux satellites, dans des sondes (Viking, Voyager,...), dans des missiles et dans la navette spaciale américaine. La NASA s'est souvenu des très bons résultats de la mémoire magnétique utilisée lors des missions Apollo. Source des images: Technikum 29. Voici l'organisation pratique de la mémoire. Les fils de sélection du mot (bleu) et les fils des bits (jaunes) sont dédoublés pour éviter les distorsions en common mode. Les fils de lecture fournissent alors aussi un signal d'amplitude double.
Ce n'est que quand le courant du mot est aussi présent que le bit est effectivement mémorisé. La champ magnétique total est alors suffisamment fort pour vaincre l'hystérésis du film magnétique.
Supposons une mémoire de 64kbyte (ou kiloöctets pour les français de France). Il faudrait alors avoir 65.536 fils de mots, ce qui est de trop. On ne va utiliser que 1024 fils de sélection; le résultat est qu'un fil de sélection va activer plusieurs mots à la fois. Il y a 64× moins de fils de sélection, il y aura donc 64 mots (de 8 bits) qui seront activés simultanément. Cela ne forme pas un problème, pendant la lecture on n'utilise qu'un seul mot et à l'écriture on n'envoie un courant que dans un seul mot. C'est une légère complication, mais c'est moins complexe que d'avoir à gérer 65.536 fils... Cela aurait naturellement été plus simple si l'ordinateur pouvait travailler avec des mots de 512 bits, mais hélas ce n'est pas le cas (et surtout pas à cette époque, où les ordinateurs avaient un bus de données de 5 à 32 bits). Le système utilise une logique TTL standard avec 4 transistors "A" qui forment une sorte de bankswitch. Les transistors se comportent comme des interrupteurs et sont aussi dessinés comme des contacts de relais. Les transistors "B" sélectionnent une des 1024 lignes de sélection de mots. L'alimentation (ligne supérieure) reçoit une courte impulsion positive au moment de la sélection. C'est un système tout simple en comparaison de la mémoire à tores de ferrite. |
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