Amplificateurs à tubes
La firma anglaise Mullard
Mullard

La firma anglaise Mullard était un fabricant de composant électroniques. La firme a été reprise par Philips avant la seconde guerre mondiale. Les circuits Mullard était très connus en Grande Bretagne, aux Pays Bas et en Belgique (pas en France).
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Comment vendre plus de composants? Pour Philips c'est simple: en vendant des postes de radio et des téléviseurs avec des composants Philips. La concurrence d'autres firmes n'est pas importante, du moment qu'elles utilisent des composants Philips. Philips a ainsi distribué de nombreux schémas avec des exemples de télévisions utilisant des composants de la marque. A la fin, les fabricants se contentaient de mettre un boitier autour du tube image Philips, du chassis Philips, du haut parleur Philips et du tuner Philips. Au début, Philips était un fabricant de lampes (d'éclairage), puis est passé aux composants électroniques. Les postes de radio et les téléviseurs n'étaient pas tellement importants, mais cela a lentement changé après la guerre quand ils se sont rendu compte qu'il y avait plus à gagner sur un poste de radio (vendu aux particuliers) que sur les composants (vendus en gros aux fabricants).

Image à gauche:
Les montages Mullard sont toujours proposés sous forme de livre, mais il est également possible de télécharger tous les schémas principaux sous format PDF. Les montages les plus connus sont repris ici.

Mullard a décidé de suivre une autre voie: Mullard propose ses composants directement aux particuliers. Mais comment faire pour qu'ils achètent ces composants? En proposant des schémas pour fabriquer des amplificateurs. Mullard se limite aux appareils qui peuvent aisément être fabriqués par les particuliers: une radio c'est trop compliqué avec tous les circuits accordés, une télé n'en parlons pas...

En poursuivant cette logique, Mullard ne propose que des circuits relativement simples qui fonctionnent du premier coup. Les amplificateurs de Mullard ont tous un étage de puissance à polarisation par résistance cathodique: pas de réglages à effectuer, le circuit est auto-stabilisé. Et tant pis si on perd quelques watts en chemin, c'est la facilité et la fiabilité qui compte.

Les circuits de Mullard sont ainsi considérés comme ce qui se fait de mieux dans le bas de gamme.

Les circuits les plus connus

5-10 (EF86, ECC83, EL84, EZ81)
L'amplificateur le plus vendu avec 5 tubes pour une puissance de 10W. Deux transformateurs de sortie sont disponibles permettant un montage en pentode ou en ultra linéaire (charge répartie).

Le schéma permet également un fonctionnement "low loading" avec la résistance cathodique de valeur plus élevée. Le low loading permet une puissance dynamique plus élevée (puissance musicale) avec une dissipation dans les tubes de puissance réduite.

C'est le montage le plus équilibré, même si les tubes EL84 peinent à atteindre la puissance annoncée. La distorsion élevée ne peut être éliminée qu'avec une forte contre réaction.

5-20 (EF86, ECC83, EL34, GZ34)
Un amplificateur pour qui veut une réserve de puissance plus élevée. On est ici limité par les caractéristiques des amplificateurs Mullard: une haute tension pas trop élevée (je crois que chez Mullard ils assumaient que 320V n'était pas trop élevé pour les mains des petits enfants qui touchent les parties hautes tension de l'ampli), une polarisation par résistance cathodique et un déphaseur à cathode commune qui attaque directement les tubes de puissance.

Ici aussi il faut une contre réaction élevée, mais c'est pour redresser la bande passante qui se réduit aux fréquences élevées à cause de l'impédance fort élevée des tubes qui doivent attaquer les EL34. Un ECC83 est ici un peu à la traine.

3-3 (EF86, EL84, EZ80)
Un petit amplificateur single ended, qui correspond à ce qu'on trouve dans un bon poste de radio. L'amplificateur est conçu pour les tourne disques qui n'ont pas d'amplificateur.

C'est un amplificateur qui travaille en classe A et a donc un mauvais rendement. La dissipation sur l'anode est de 13W pour un courant de 50mA (le tube travaille en fait au delà de ses limites).

Le couplage entre préamplificateur et étage de puissance est direct. Je ne sais pas ce qui leur a pris, car cela les oblige à faire des compromis. Avec l'énorme résistance anodique de 1MΩ du EF86 on limite automatiquement la bande passante vers le haut à cause des capacités parasites. Le but de cette résistance énaurme est d'avoir un gain suffisant pour pouvoir faire jouer à fond la contre réaction.

AC/DC (UF86, UCL82, UY85)
Dans les années 1950 il y avait encore des régions alimentées en continu en Grande Bretagne. Cet amplificateur tout courant n'a pas de transfo d'alimentation. La puissance disponible dépend de la tension d'alimentation. Pour le chauffage des tubes, on utilise une chaine série (100mA) et on absorbe la tension en excès via des résistances.

L'amplificateur est limité en fréquence via un condensateur de 1.2nF sur l'anode du tube préamplificateur et une réduction des basses via le condensateur de couplage de 5nF. L'inconvénient c'est que ce filtre est englobé par la contre réaction, qui va donc tenter de redresser la bande passante en amplifiant plus ces fréquences. Conclusion: la distorsion augmente pour les basses et les aigues. Pour limiter la bande passante de façon correcte il faut soit placer le filtre hors du champ d'action de la contre réaction ou mettre le filtre adapté dans la boucle de contre réaction même.

Le boitier est mis au zéro volt (le neutre, si tout va bien) via un condensateur de 50nF. En théorie le boitier métallique n'est donc pas connecté au secteur, sauf s'il y a un petit cours circuit quelque part. Le rapport signal/bruit est moindre qu'avec un ampli normal à cause des parasites secteur. Il peut également avoir des courants de fuite vers le boitier aux soquets des tubes.

C'est le seul montage qui utilise un déphaseur paraphase au lieu de Schmitt, probablement parce que l'influence de la tension de secteur du filament sur la cathode (flottante) est trop importante et produit un ronflement à 50Hz.

Le tube UCL82 dans sa version 6.3V (ECL82) est décrit ici.

Caractéristiques principales des circuits Mullard

Mullard veut vendre un assortiment complet de tubes: EF86, ECC83, EL84, EL34, EZ80, EZ81, GZ34. On trouvera donc un EF86, un ECC83, deux EL84 et EZ81 dans l'amplificateur le plus fabriqué, le 5-10 (5 tubes, 10 watts). Mullard n'utilise pas de tubes plus ésotériques comme le ECC82 ou ECC81 (mais qui seraient mieux adaptés dans certaines circonstances). Dans certains cas, cela limite la puissance que l'ampli peut fournir: le tube ECC83 est limite pour attaquer une paire de EL34.

Tous les circuits utilisent le déphaseur à cathode commune, aussi appellé déphaseur de Schmitt. Ce type de déphaseur a même tellement été utilisé, qu'on appelle ce déphaseur aussi déphaseur de Mullard.

L'avantage est que ce circuit donne une amplification supplémentaire, ce qui est nécessaire pour pouvoir utiliser un feed back maximal. Et c'est aussi la raison pour laquelle Mullard n'utilise que ce type de déphaseur. Par contre quand le tube s'use, les caractéristiques du déphaseur se dégradent fortement (ce qui n'est par exemple pas le cas avec le déphaseur concertina).

Le feed back très important est nécessaire pour donner un résultat consistant et acceptable, même avec des composants de fournisseurs inconnus (tous les particuliers n'achetaient pas tous leurs composants chez Mullard). C'est à cause de ce feed back très important que tous les amplis ont une pentode préamplificatrice (qui a un gain plus important) au lieu d'une triode.

Le déphaseur à cathode commune avec deux triodes ECC83 produit une amplification du signal. Mais un montage cathodyne (une triode) précédé d'une triode préamplificatrice produit lui aussi une amplification. Donc pourquoi ne pas utiliser ce montage? Parce que le montage cathodyne avec son tube préamplificateur ajoute un étage dans la boucle de contre réaction, ce qui peut provoquer une instabilité de l'ampli (c'est également la raison pour laquelle l'ampli Williamson qui a un étage en plus est moins stable).

Les amplificateurs Mullard étaient ce qui se faisait de mieux pour le prix. Ils étaient également ce qui se faisait de mieux pour la hifi grand public dan les années 1950 - 1960. Mais ces amplificateurs ne sont pas particulièrement musicaux. Ce n'est pas la référence, bien qu'on trouve de nombreux documents en ligne (le manuel Mullard d'origine est même disponible en ligne sous format PDF). Aucun circuit Mullard n'est repris dans les anthologies des meilleurs amplificateurs.

L'étage de puissance est dans tous les cas à polarisation par résistance cathodique. Mullard signale que les caractéristiques pour la musique et la parole ne sont pas plus mauvais qu'un montage à polarisation négative. Mullard utilise soit une résistance cathodique par tube, soit une résistance commune.

En cas de résistance cathodique commune dans l'étage de puissance il faut de préférence utiliser des tubes pairés. Quand un tube a sa grille de controle contaminée (cela peut arriver au bout de plusieurs centaines d'heures de fonctionnement à courant élevé) le tube correspondant est rapidement détruit car la régulation du courant ne fonctionne que sur les deux tubes.

De nombreux petits fabricants ont proposé des amplificateurs MUllard déjà montés, tout le monde ne savait pas manier un fer à souder à l'époque (et je crois que maintenant la proportion s'est encore réduite).

Utiliser ces schémas dans un ampli moderne?

Je décris de nombreux schémas historiques et j'indique chaque fois si cela vaut la peine de construire un amplificateur identique ou s'il faut remplacer des composants. Voici mon verdict:
  • 5-10
    C'est un amplificateur qui peut être construit tel quel, de préférence avec un tranformateur qui permet le fonctionnement ultra linéaire (qu'on utilisera ou pas, au choix). Eventuellement utiliser une polarisation des grilles par tension négative qui permet de faire travailler l'ampli en classe AB et gagner quelques watts.

  • 5-20
    Les (chers) tubes EL34 ne sont pas utilisés au mieux de leurs possibilités. Le son de cet amplificateur manque un peu de clarté et de netteté à cause de l'attaque des tubes de puissance qui est un peu faible. L'amplificateur de type Williamson a plein de défauts (qu'on peut corriger), mais un Williamson est mieux à sa place ici pour commander une paire de EL34.

    On pourrait commencer par remplacer le ECC83 du driver par un ECC82 (brochage identique) et réduire la valeur des résistances anodiques à 47 et 56kΩ (résistance cathodique de 27k). Il faut des résistances asymmétriques pour avoir un signal identique sur les deux sorties (à controler à l'oscilloscope).

  • 3-3
    Un petit amplificateur facile à réaliser. Remplacez la diode thermo-ionique par une diode au silicium et utilisez un tube combiné ECL86 ou ECL805 qui permet de se passer de la pentode préamplificatrice. Attention, la dissipation maximale de ces tubes est moindree que celle d'un EL84. Le circuit avec couplage direct n'est pas recommandé: recherchez sur le net un circuit SE pour ECL86 ou PCL86.

  • AC/DC
    Un tel type de montage connecté au secteur est interdit depuis de nombreuses années. On peut construire un ampli équivalent avec des tubes fonctionnant en 6.3V: EF86 et deux ECL86. Je ne suis pas un grand fan du montage paraphase, j'aurais préféré un cathodyne. S'il ne faut pas de controle de tonalité on peut éliminer le EF86 et faire un petit push pull avec seulement deux tubes par canal. Eliminer les composants qui limitent la bande passante, garder éventuellement un petit condensateur de 22..100pF pour la stabilité de l'ampli.

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